Seul face au pic d’Orhy, Thierry Berridi garde 2000 brebis tout l’été sur les hauteurs de Larrau. Du lever à l’aube jusqu’à la tombée de la nuit, le berger veille sans relâche sur le troupeau de dix-huit éleveurs. Un métier rude, souvent solitaire, où l’instinct, les chiens et la passion de la nature font la différence.
Ancien boucher devenu berger, Thierry Berridi a tout appris sur le tas. Chaque été, depuis cinq ans, il s’installe en estive sur les hauteurs de Larrau, dans les Pyrénées basques. Seul face à la montagne, il vit au rythme des bêtes, des chiens et des éléments. Un quotidien rude, sans filet, où l’endurance, la débrouille, l’amour des bêtes et de la nature sont les seuls guides.


Au rythme des brebis, dès l’aube
À Larrau, les journées commencent à la frontale ! À cinq heures, Thierry est déjà dehors, au pas, pour aller chercher les brebis “à la couche”, là-haut, dans la pente. Puis, il les “lance” : comprendre, il les laisse partir brouter librement, mais sous surveillance. Car ici, pas question qu’elles franchissent la frontière espagnole ni qu’elles se mêlent aux autres troupeaux. Le moindre écart complique le tri, les soins, les vaccins : “elles démarrent toutes seules. Moi, je suis derrière, du matin au soir.”
Employé par un groupement d’éleveurs, Thierry passe l’été en estive à leur place. Il veille sur les bêtes pendant qu’en bas, les agriculteurs soufflent un peu, gèrent les foins, les cultures et préparent la saison de traite. Un rouage essentiel dans l’équilibre fragile du monde agricole : “En estive, les bêtes profitent d’une meilleure herbe. Et les éleveurs ont les mains libres quelques semaines. Ça leur fait du bien aussi”, explique le berger.


Et même si le décor est grandiose et que la solitude peut sembler enviable à certains égards, sur le terrain, la réalité est autrement plus rude : « Le plus dur, ce n’est pas le troupeau, c’est parfois le temps. J’ai déjà eu trois mois de brouillard d’affilée. Je n’avais aucun repère. Physiquement, ça allait, mais mentalement, j’étais lessivé.” À cela s’ajoutent les imprévus car le berger ne peut pas être partout : “il y a toujours une bête qui se blesse ou qui s’égare… On fait ce qu’on peut.”
En pleine chaleur, les brebis marquent une pause vers 14 heures, avant de repartir paître aux environs de 17h jusqu’au soir, 21 heures. Certaines brebis peuvent rester deux jours sans boire, la rosée du matin étant suffisante pour qu’elles s’hydratent. Thierry, lui, rentre épuisé de ses journées, avale un repas et se couche sans tarder. “Ici, les soirées ne s’éternisent pas ! On est fatigué de la journée.”

Mais pour garder 2000 brebis, il faut plus que de la volonté : il faut des chiens. Dressés par lui, ses chiens obéissent à la voix : gauche, droite, stop. “Un bon chien, c’est ton binôme. Sans eux, tu ne fais rien.” Ses chiens restent libres autour de la cabane une fois le travail achevé car il ne conçoit pas de les attacher : “C’est comme une personne, on n’attache pas les gens une fois qu’ils ont terminé leur journée de travail ! »
Autre épreuve à laquelle se confronte le berger en estive : les randonneurs. Entre les chiens lâchés au milieu des troupeaux, les passages non respectés et le manque de considération, la tension peut parfois monter : “La montagne appartient à tout le monde, mais le problème, ce n’est pas le chien, c’est le maître !”


Quant à la relève, elle semble se dessiner. De plus en plus de femmes choisissent de monter en estive. “Elles gèrent aussi bien que les hommes. Il suffit d’avoir un bon chien. » Le métier attire aussi des jeunes en quête de sens. Thierry les encourage : “Il faut aimer les bêtes. Le reste, on l’apprend sur le tas. Avec de la motivation, on y arrive. » Et quand on lui demande pourquoi il y retourne chaque été, la réponse tient en peu de mots : “Pour les chiens, pour la nature, pour les bêtes.” Et parce qu’à Larrau, loin du vacarme du monde, Thierry a trouvé sa place.
Instagram de Thierry Berridi
Photos : Flore Bonnard
5 réponses
Bonjour Thierry,
En lisant ton reportage je suis très ému.
Cela me renvoie la période que nous avons partager tous ensemble ..
C’est un métier qui te correspond .
Je te souhaite une très belle continuation.
Et surtout prends soin de toi.
Bises
Françoise
Très beau reportage
Merci !
Quelle belle aventure entre la nature, les bêtes et l’humain.
Métier unique où seule la nature nous guide.
Aupa Titi. 😉
Merci pour se beau reportage